LE FESTIVAL DE CHASSEPIERRE Á L’AUBE DE SON CINQUANTENAIRE
Les arts de la rue seront une nouvelle fois à l’honneur les 19 et 20 août
- Publié le 26-07-2023 à 10h17
Un festival bientôt quinquagénaire, mais tellement jeune
Créé en 1974, le ‘Festival des Arts de la Rue’de Chassepierre (Florenville) approche de la cinquantaine. Pour commémorer l’évènement avec faste, la fête d’anniversaire d’août 2024 se prépare déjà dans les coulisses, mais les surprises prévues sont gardées dans un secret absolu.
Ce qu’on peut cependant dire aujourd’hui sans crainte de se tromper, c’est que le presque quinquagénaire se porte comme un charme et paraît de plus en plus jeune, tant il rassemble toutes les générations. La fidélité légendaire des festivaliers fait côtoyer aujourd’hui, des retraités qui ont connu les premières éditions quand ils usaient leurs culottes sur les bancs de l’école, avec leurs enfants et leurs petits-enfants. Aujourd’hui, ils ont l’énorme plaisir de découvrir des spectacles sans cesse renouvelés, en famille, avec des ados ou des bambins dans leur poussette. Cette année, ils seront encore tous au rendez-vous pour l’édition 2023.
En cinquante ans, 1 500 compagnies et 800 000 spectateurs ont longé les rives de la Semois pour s’installer le temps d’un week-end dans l’emblématique village de Chassepierre. Le Festival a connu des moments forts et des moments plus compliqués, mais bien plus d’éditions ensoleillées que les quelques-unes où la météo a obligé les troupes et les festivaliers à déployer des tonnes d’originalité pour que l’esprit du Festival perdure malgré tout dans la bonne humeur. En se remémorant toutes les éditions précédentes, c’est l’histoire des ‘Arts de la Rue' qui défile. Il y a cinquante ans, l’expression ‘Arts de la Rue' n'était pas employée, le métier n’existait pas, il n’y avait pas encore d’écoles pour se former à cet art multiple. Chassepierre est probablement le seul festival en Europe qui a réussi ce pari de pouvoir fêter un tel anniversaire, un peu comme des noces d’or entre l’authenticité d’un village et une fête délirante. Pari fou qui a réussi à prendre le virage de la professionnalisation, en réunissant le meilleur tant au niveau de l’organisation que des spectacles proposés, mais surtout sans perdre son âme. Pari fou qui a permis à ce petit village de 90 habitants d’accueillir un public de plus en plus nombreux, 25 000 festivaliers chaque année. Pari fou mené par une ASBL qui a réussi à rassembler 300 bénévoles qui prennent une part prépondérante dans la réussite du festival et dans l’incroyable notoriété acquise par Chassepierre.
Pari fou aussi, quand le festival a connu un tel succès populaire, qu’en 2003, il a débordé des ruelles du village pour s’étendre aux grandes prairies de part et d’autre de la Semois. Le pont du Breux au-dessus de la Semois, qui permettait de relier en tram les villages de Chassepierre et Sainte-Cécile, avait été détruit en 1940 lors de la seconde guerre mondiale. Il a finalement été reconstruit à l’identique en 2013 pour le plus grand plaisir des habitants du village, des touristes et des festivaliers. Cette ouverture sur des espaces plus larges a permis d’étendre le programme du Festival aux métiers du cirque.
Le charme d’un lieu exceptionnel qui dégage un parfum paisible avant de s’enflammer pendant deux jours.
L’édition 2022 a fait suite à deux années de pandémie où le Festival de Chassepierre a vécu dans l’incertitude. Le week-end a été marqué par la volonté des organisateurs de redevenir ‘une histoire familière, tout en proposant une création singulière’, afin de recréer les liens entre les artistes et les publics.
Pour le festival de cet été, l’accent est mis sur un autre thème, ‘des délires aux idées claires’. L’idée est d’inciter les festivaliers à se laisser bercer insouciamment dans le rire, la joie, les émotions fortes procurées par les doux délires des artistes. Puis, en fin de journée, une fois le calme de l’après-fête revenu, le spectateur, encore tout sourire des bons moments vécus, quand les derniers éclats du soleil scintillent encore dans les eaux de la Semois, prendra le temps de laisser ruisseler en lui les idées claires des messages présents à l’arrière-plan des spectacles.
Le déambulement entre prairies et ruelles pittoresques du village ne serait pas au comble du plaisir, sans quelques arrêts au marché des artisans et producteurs locaux dont les stands sont garnis de produits de bouche, mais aussi des créations variées (jouets de bois, produits au lait d’ânesse, safran gaumais, porcelaine, art de l’émail, créations textiles, bijoux, sacs, chapeaux, sculptures, peintures, articles de vannerie…).
Depuis de nombreuses années, le festival de Chassepierre s’inscrit dans le développement durable et cherche à réduire au maximum son impact sur l’environnement. “On sent que notre préoccupation est de plus en plus partagée par les artistes, se réjouit la directrice artistique Charlotte Charles-Heep. L’un d’entre eux utilise du matériel de récupération pour son spectacle, ses costumes sont bio et son ampli fonctionne à l’énergie solaire. ”
Une histoire qui démarre par une page de poésie
Née, et décédée à Florenville à 93 ans, la poétesse et écrivaine Marie Fizaine était viscéralement attachée à sa terre gaumaise. Elle en a relaté l’histoire et s’en est inspirée dans ses œuvres. En 1974, elle a invité quarante-neuf de ses amis, venant des quatre coins du pays et de France, pour les rassembler dans un festival des poètes et écrivains. Elle a choisi le village de Chassepierre, un des plus beaux villages de Wallonie, pour la première édition de ce qui deviendra au fil des années le ‘Festival International des Arts de la Rue’. La forme est différente, mais l’ensemble et chaque spectacle dégagent eux aussi un parfum de poésie, comme l’aurait rêvé Marie Fizaine.
Pendant quarante ans, Alain Schmitz fut le directeur éclairé du Festival. D’année en année, d’idées sages en idées délirantes, il a fait du petit évènement littéraire de 1974 un des plus importants festivals des arts de la rue sur la scène internationale. Il s’est appuyé d’abord sur les habitants du village qui mettent un point d’honneur à soigner Chassepierre aux petits oignons pour que le jour J, pas un parterre de fleurs ne soient à son apogée, que pas une haie n’ait été négligée, que pas un volet en bois n’ait été rafraîchi. Quand les premiers festivaliers débarquent, tout a été mis en œuvre pour les accueillir de manière optimale.
La deuxième béquille sur laquelle il a pu s’appuyer, compte 300 bénévoles fidèles venus de toute la région pour aménager le site, organiser idéalement le séjour des artistes comme des spectateurs, et, in fine, ranger le tout, pour rendre le village à ses habitants, pour qu’ils y retrouvent leur quiétude après un week-end de folie.
Une nouvelle directrice qui vit son métier comme une passion
Après l’édition de 2014, Alain Schmitz a pris du recul et a cédé le relais à Charlotte Charles-Heep, bercée depuis sa tendre enfance dans l’esprit Chassepierre. “J’ai encore des photos où mes parents déambulent dans les rues de Chassepierre avec ma poussette, explique la jeune dame de 34 ans. Nous habitions à Sedan dans les Ardennes françaises, mais jamais la famille n’aurait manqué une édition du festival de Chassepierre. Mes premiers souvenirs remontent quand j’étais âgée de six ans où, des étoiles plein les yeux, j’applaudissais les comédiens et les magiciens. Très tôt, je me suis mêlée aux bénévoles où j’ai pu découvrir toutes les facettes de cette grosse machine. J’ai entrepris des études de ‘conception et mise en œuvre de projets culturels en art du spectacle' à Metz et Strasbourg. En 2011, Alain Schmitz m’a proposé de devenir son bras droit et il m’a transmis sa formidable expérience. Aujourd’hui, je suis directrice-artistique et je mesure tous les jours ma chance de faire de ma passion, mon métier. ”
Outre l’organisation qui est un des piliers essentiels de la réussite de Chassepierre, l’Ardennaise attache une importance cruciale à la programmation. “Je voyage à travers l’Europe pour repérer des nouveaux spectacles, indique-t-elle. Je mets un point d’honneur de renouveler complètement le programme d’une année à l’autre. Je dois monter une programmation diversifiée qui offre un panel des différents arts. Je dois aussi veiller à tenir compte du lieu du spectacle où ils vont évoluer. Ce n’est pas la même chose que de se produire dans une ruelle qui peut accueillir une centaine de spectateurs que dans un champ au bord de la Semois devant 1 500 personnes. Je suis aussi très attentive à la capacité des artistes d’accrocher et de subjuguer leur public. ”
Chassepierre, au cœur d’une région touristique aux multiples attraits
Camping, gîtes, hôtels et restaurants font le plein, parfois jusqu’en France à cent kilomètres à la ronde. Il faut souvent réserver un an à l’avance. La région est idéale pour prolonger le séjour des festivaliers : Bastogne et son War Museum, les vestiges Gallo-Romain d’Arlon, les méandres de la Semois ou de l’Ourthe à Bouillon, Chiny où La Roche, le Grand-Duché tout proche, sans oublier les tables gastronomiques disséminées dans toute la région… sont autant d’étapes pour agrémenter le séjour à Chassepierre, le petit village à la frontière entre les régions de Gaume et de l’Ardenne.
Un programme varié pour tous les goûts et tous les âges (Programme succinct)
Cinquante compagnies venues des quatre coins d’Europe, Belgique, France, Suisse, Pays-Bas, Angleterre, Italie… se sont donnés rendez-vous les 19 et 20 août sur les différentes scènes magiques du petit village gaumais de Chassepierre.
Le programme complet peut être téléchargé sur le site www.chassepierre.be.
Dans une sélection non exhaustive, nous proposons quelques coups de cœur :
- Pour ceux qui savent se lever dès potron-minet, le coup d’envoi du Festival sera donné le 19 août à 6h. Bernard Massuir vous invitera à un concert imaginé comme une contemplation, un moment hors du temps. Des airs à fleur de peau, légers comme la lumière.
- Le 19 août en début d’après-midi, le grand démarrage du Chassepierre 2023 sera donné par les Français de la Compagnie ‘Juste Avant l’Oubli’. Leur récital fou, au cœur d’un dispositif sonore enveloppant, fait sonner les sentiments et crépiter le palpitant. Pour eux, la limite entre la vie et la mort est complètement dépassée.
- La compagnie ‘Bancale’ proposera un spectacle de cirque, axé sur le handicap. Les béquilles, chaises roulantes et prothèses ne sont pas des obstacles à la performance et aux délires, mais incitent aussi à la réflexion.
- Autour d’une impressionnante roue de la mort, bercés par les notes d’un violoncelle, le joyeux trio de la compagnie ‘La Meute’, invite à re-devenir de véritables enfants et partir pour un voyage acrobatique, musical, hypnotique et résolument poétique.
- La compagnie ‘La Contrebande’, à travers la création ‘Clan Cabane’, évolue sur un terrain de jeu riche en possibilités d’exploration acrobatique. C’est l’occasion rêvée de créer quelque chose ensemble, avec les moyens du bord. Construire et déconstruire un abri éphémère, une barricade, une zone à défendre.
- Nos vies, tiraillées entre liberté et gravité, seront remises en question par la création ‘Solitude. s’de la compagnie ‘La Migration’. Leur but est de ne plus être simplement les observateurs ou les constructeurs du paysage mais d’en faire partie, de le nourrir autant qu’il nous nourrit, d’être en coexistence et en dialogue avec lui.
- Musique et burlesque sont au programme de la compagnie ‘Zique à tout bout d’champ’. Dans un délire de sons, musiques savantes et pop alterneront.
- Â tout âge, tomber amoureux nous plonge dans des états lumineux, dévastateurs, décalés, puissants, anesthésiants. L’amour nous illumine, nous effraie, nous stabilise, nous rend tour à tour vulnérable et fort. La mise en scène de la compagnie du ‘Théâtre du Sursaut’ ose rire de nous, en tirant tout cela vers l’absurde.
- La compagnie ‘Legoboum’ se met dans la peau d’un chien qui analyse les comportements de son pseudo-maître, dans un mélange de délires hilarants.
- Caillasse est un des spectacles de la compagnie ‘Le Guichet’. Il met en scène un prisonnier qui rêve de s’évader. Le public oscillera entre univers grinçant, poésie et humour caustique d’un duo qui enchaîne acrobaties, chants a cappella et impros avec le public.
- Le collectif ‘Jamais trop d’art’ plongera les spectateurs dans le monde de l’absurde que connaît notre société. A la caisse d’un supermarché, un homme qui a oublié sa carte de magasin, s’enfuit quand il voit un vigile venir à sa rencontre. Considéré comme une menace pour la société, le monde politique et médiatique s’emballe.
- Avec les danses collectives, les rythmes charnels, l’élégance, la ‘Dyptik-compagnie’ veut bousculer les codes de l’intime et du spectacle. Le public est un acteur. La musique, les voix, les corps arrivent de toute part parce que tout le dispositif est conçu dans cette perspective d’immersion totale.
- Les arts numériques sont aussi mis à l’honneur à Chassepierre. A 21h30, tous les regards seront tournés vers le clocher de l’église Saint-Martin. Nathalie Maufroy fera sortir des mains géantes des fenêtres, puis des créatures monumentales et surréalistes investiront l’espace.
- Le soir, c’est la compagnie des ‘Ptits Bras’, qui avec une nouvelle création alliant cirque, humour et esthétique, clôturera le festival 2022 et donnera le ton de la prochaine édition des 50 ans.
Comment s’y rendre
Chassepierre est un petit village situé à la sortie de Florenville, en contrebas de la route qui mène à Bouillon. Un point de vue situé le long de la route permet d’admirer le site du village et des méandres de la Semois.
En train, la gare la plus proche est celle de Florenville sur la ligne 165, entre Libramont et Virton.
L’aéroport le plus proche est celui du Findel à Luxembourg-ville.
La Billeterie
Réservations sur www.chassepierre.be (rubrique : tickets) ou au syndicat d’initiative de Florenville (1, esplanade du Panorama)
- Préventes jusqu’au 18 août : 20€ par journée, ou 30€ les deux jours (enfants de 8 à 12 ans : 8€ par jour, 12€ les deux jours, gratuit pour les moins de 8 ans)
- Sur place : 28 € par journée, ou 38€ les deux jours (enfants de 8 à 12 ans : 10€ par jour, 15€ les deux jours, gratuit pour les moins de 8 ans)