La vie après le maïorat (7): à Couvin, Raymond Douniaux a refait un potager
Raymond Douniaux a cartonné aux élections de 2018. Mais il a dû céder sa place de bourgmestre. Cela l’a rapproché de la nature.
- Publié le 13-01-2020 à 18h00
Il a pu ressortir sa bêche et son râteau pour la première fois depuis vingt ans. Raymond Douniaux, il y a un an, s’est rapproché de la nature alors que les affaires politiques s’éloignaient de lui, résultat d’une coalition défavorable à sa liste Pep’s. Malgré un carton de 1844 voix, il a été prié de rejoindre les bancs de l’opposition, alors qu’il s’apprêtait à entamer un troisième mandat mayoral.
«Je continue à m’intéresser à la vie communale. Je lis attentivement tous les procès-verbaux des collèges communaux ou de police. Je prends des notes, dans mon petit cahier de brouillon. Mais en conseil, je n’interviens pas pour le plaisir…»
L'homme a profité de cette préretraite forcée pour se rapprocher de ce qu'il aime par-dessus tout: le contact avec la nature. Déjà pendant ses mayorats, il était régulier qu'il nous réponde au téléphone depuis un bois de Brûly, venant juste d'éteindre sa tronçonneuse. «J'ai une propriété de deux hectares. J'y fais des parts de bois avec mes enfants. Maintenant, ils coupent et je charge. Nous avons replanté 75 charmes et hêtres l'an dernier. J'ai des moutons et j'ai donc refait un potager, ce que je n'avais plus fait depuis 20 ans.»
Ce qu'il aime? Y partir pour une journée, avec ses tartines et une petite bière. «J'arrive avec ma voiture devant la barrière et je regarde les oiseaux et puis, depuis quelque temps, un écureuil brun. J'apprécie encore plus la nature qu'avant…»
J’ai célébré un millier de mariages en 24 ans.
Ces petits bonheurs remplacent les turpitudes des collèges communaux couvinois. «Maintenant, je profite de ma vie de famille, ce que je ne faisais pas autant depuis longtemps. Je peux souper elle en soirée! Je n'ai plus à célébrer des mariages le week-end non plus. J'en ai célébré un millier en 24 ans.»
Il s'offre même des petites escapades le week-end, en Alsace, sur la côte ou à Montbard, la ville jumelle. Et puis il continue de fréquenter l'Université du troisième âge, le club de philatélie et le comité dynastique de Dailly. «Je m'offre une pause le mercredi. C'est ma journée de détente, avec un petit passage au marché et un apéro avec des amis…»
Il n’abandonne pas la politique
Cette vie de paisible retraité ne signifie pas pourtant l'abandon de la politique. «Je reste au service des citoyens, même si je n'ai plus les mêmes leviers qu'avant évidemment. Certains me contactent encore pour demander une intervention de la Commune. Je transmets alors le message. Je me tiens informé et je poursuis mes trois mandats actuels. Et dans cinq ans, si ma santé reste bonne, je compte bien me représenter aux élections.»
Ou revenir au poste de mayeur plus tôt, si la majorité ne tient pas? «Je ne crois pas qu'elle se cassera la figure, non. Je pense qu'elle tiendra.»
Pour Raymond Douniaux, le soir des élections d’octobre 2018 reste un très mauvais souvenir. Alors que son partenaire CVN promettait depuis des semaines de prolonger l’aventure «aux affaires», la liste Pep’s apprenait qu’elle était reléguée dans l’opposition, à la faveur d’une majorité CVN-MR-IC.
«Ça a été un véritable coup de massue. Je n'ai heureusement jamais eu de cancer, mais j'ai l'impression qu'on a le même sentiment quand on nous apprend une telle nouvelle. J'en aurais pleuré.» Au sentiment de trahison ont succédé de nombreuses marques de sympathie de la part des citoyens couvinois. Des SMS, des cartes et des coups de fil. Il nous relit d'ailleurs plusieurs SMS reçus à l'époque. «J'ai gardé beaucoup de messages. Et je vois encore que des gens traversent la rue pour venir me saluer amicalement, encore maintenant. Beaucoup n'ont pas compris pourquoi je n'étais pas resté bourgmestre avec un tel score… Mais bon, les leaders des deux formations adversaires savaient que leur accord était la seule chance pour eux d'obtenir un mayorat. C'est Maurice Jennequin qui l'a eu finalement.»
1844 voix de préférence. Un record absolu dans la Commune. De loin. Et au sein d'une liste divisée. Aurait-il dû créer sa propre formation? «Peut-être. Cela aurait redistribué les cartes, c'est sûr. Mais c'est le passé. Pas besoin de revenir là-dessus…»
Le socialiste rappelle avec fierté le parcours réalisé: «En début de carrière à l'intercommunale IECE, j'ai été éboueur pendant six mois. J'ai quand même fini échevin puis bourgmestre douze ans. Je pense que je n'ai pas à rougir de ma carrière politique.»
Il glisse d’ailleurs avec bonheur que des citoyens continuent de l’appeler «mayeur» quand ils le croisent. Dans sa tête, lui-même n’a sans doute pas tout à fait quitté son poste non plus…