Série élections | Lambert Demonceau, à Thimister, "a saisi les opportunités"
Bourgmestre depuis 2018 et impliqué en politique depuis 1983, Lambert Demonceau (EIC), 67 ans, souhaite poursuivre ses projets. Ses trois principales fiertés de cette mandature ? Ses regrets? Il répond aussi aux questions de l’opposition et des citoyens.
- Publié le 05-03-2024 à 07h01
1.La réalisation de la crèche communale
"En premier, c’est l’inauguration, en 2019, de la crèche Li Tiyou à La Minerie. C’est un tout nouveau service aux familles de Thimister-Clermont, car nous n’avions pas d’établissement pour les petits. Elle vient compléter l’offre des gardiennes ONE. Depuis cinq ans, notre crèche est complète. Elle compte 28 places, elle peut donc accueillir quotidiennement une quarantaine d’enfants.
On vient d’avoir une opportunité, en concertation avec le Centre Régional de la Petite Enfance (CRPE), de transformer le co-accueil à côté de la poste (actuellement 7 places) en mini-crèche. C’est grâce à un appel à projets de l’ONE, et cela va nous permettre de transformer la salle des facteurs en mini-crèche en passant à 11 places… avec une extension possible à 14 places. Ce sera géré par le CRPE, pas par la commune. On va le mener à bien pour fin mars 2025, soit dans un an. On commence à réfléchir, avec l’architecte, aux plans. Ce sera encore un plus par rapport à la crèche communale."
2.La nouvelle maison communale
"Ce n’est pas seulement au niveau du bâtiment en tant que tel, mais c’est aussi et surtout de bien meilleures conditions de travail pour le personnel et enfin un vrai accueil pour le citoyen qui est reçu et aiguillé vers les différents services.
C’est un fameux plus, aussi, qui s’inscrit dans un futur quartier. Ce n’était pas du tout imaginé en 2018, en tout cas pas de cette manière. C’est là qu’on voit que le PST (Plan stratégique transversal) est un outil intéressant… Mais que toutes les communes ont été amenées à un moment à chambouler leur programme PST. Gérer une commune, c’est vraiment une question d’opportunités. C’est comme le projet Cœur de Village, qui est un appel à projets du ministre Collignon. Ce sont des impulsions ou des opportunités qu’on reçoit. Entre ce qu’on croit faire, ce qu’on va faire et ce qu’on fait réellement, il y a une marge. Mais il y a des heures qui ne sonnent qu’une fois: si nous n’avions pas saisi cette opportunité, on l’aurait regrettée."
3.Le patrimoine religieux
"La remise en valeur des églises de Thimister et de Clermont par des restaurations importantes, c’est évidemment une fierté. On parle plus de patrimoine que de culte, car nos églises sont au centre de nos villages, elles font partie du patrimoine commun. Et nous sommes fiers d’avoir remis en état ces édifices. Nous continuerons d’ailleurs avec les chapelles, dont celle de la rue Cavalier Fonck. Nous avons une très bonne collaboration avec l’AWaP (l’Agence wallonne du Patrimoine). Et la cerise sur le gâteau, c’est le concours pour les nouveaux vitraux de l’église de Clermont. C’est une première en Wallonie, et cela se passe bien à ce niveau-là. Nous rouvrirons cette église en avril."
Ses regrets
1. La complexité administrative
"C’est comme pour tous mes collègues: la complexité administrative. Cela s’est fort accentué, essentiellement et malheureusement à cause des normes européennes. Elles sont complètement démesurées par rapport aux travaux qu’on a dans de petites communes. On n’a pas le personnel pour gérer tout cela. On n’est responsable de rien, mais on est obligé de mettre ce qu’on nous dit en place. Depuis le 1er janvier 2024, par exemple, on doit payer un acompte de 15% sur des travaux. Sur quoi ? Pour quels travaux ? Avec quelles garanties ? C’est un truc complètement débile encore. Toute cette complexité, c’est le plus tuant dans notre job au quotidien."
2. Le recrutement
"On a de grosses difficultés dans le recrutement du personnel. On a une RGB, une révision générale des barèmes, qui n’est plus du tout adaptée à notre époque. On ne sait plus concurrencer le privé. On a beau être attractif en termes de proximité, de travail, de confort… On ne sait plus être en concurrence avec un privé qui va proposer une voiture de société, une assurance hospitalisation, etc. On fait ce qu’on peut dans le cadre qui est le nôtre (avec des chèques repas, un second pilier de pension…), mais on a du mal à recruter des personnes compétentes. Et toutes les communes sont concernées."
3. Le Covid
"Je regrette les deux années de “perdues” avec les crises qu’on a pu connaître: le Covid, l’Ukraine, le problème énergétique, etc. On a eu des difficultés à tout relancer, pour le niveau communal mais aussi pour l’associatif. Ça n’a pas été évident de tout relancer, car on a quand même accusé le coup à un moment donné. Le blues est aussi venu de là, on s’est demandé où on allait. Il fallait le temps que cela redémarre, mais on s’en est remis et on est de nouveau sur notre lancée. Ce fut une période très spéciale."
La question de la rédaction
La Commune vient d’investir plus de 4 millions d’euros sur le site Ruwet pour sa nouvelle maison communale ainsi que l’achat des bâtiments de Vinifrance et l’ancienne cidrothèque (bâtiments qu’il faut encore rénover). Durant la même mandature, le chantier de Bois Hennon aura ponctionné dans les 1,5 million d’euros (sur fonds propres) aux finances communales, tandis qu’Elseroux chiffre aussi à près de 1,4 million (avec des subsides d’environ 250 000 €) et que le projet Cœur de Village, qui doit administrativement être finalisé en juin 2024, est estimé à 1 450 000 € (dont un million sur fonds propres). Cela fait beaucoup pour une petite commune comme Thimister (environ 5600-5700 habitants). La Commune ne vit-elle pas au-dessus de ses moyens ? Comment garantir que les nombreux et coûteux projets lancés durant cette mandature ne vont pas plomber les finances de la prochaine mandature ?
"Il n’y a vraiment aucun souci par rapport à cela. Nous avions provisionné pas mal d’investissements et nous n’avions plus fait d’emprunt depuis 2016, à l’exception d’une petite partie pour la maison communale. Donc le niveau de la dette continue à diminuer. Et nous garderons évidemment les impôts aux mêmes taux. Nous sommes en capacité, par rapport aux recettes de l’IPP et du foncier, de mener ces investissements ambitieux pour le bien de notre population. Il n’y a pas de danger financier à ce niveau-là.
La commune est gérée de façon sérieuse depuis 1994, on a la chance d’avoir une sociologie, une population, aisée. Et alors nous avons le zoning qui rapporte entre 1,3 et 1,4 million d’euros par an. Il nous donne de la respiration, c’est notre bulle d’oxygène. Le taux d’emploi est élevé à Thimister (nous avons 830 ou 880 indépendants, de mémoire, ce qui fait de nous les premiers en province de Liège par habitant membre de la population active… On a la chance d’avoir ce tissu d’indépendants, car le zoning ne représente que 15% des entreprises). Nos indépendants et le taux d’emploi élevé contribuent aussi à avoir ce tissu social prospère car nous n’avons que 4,7% de chômage. Grâce aux impôts que le zoning génère par rapport au foncier après cinq ans (il y a une exonération), grâce aux emplois, nous avons chaque année près de 1,4 million dans les caisses communales pour des investissements. Nous n’avons pas d’autres recettes exceptionnelles comme la vente de bois ou Resa, mais nous avons cet extraordinaire outil qu’est le zoning. Et il va encore s’agrandir de 4,5 hectares le mois prochain. C’était une idée de génie de l’époque d’avoir participé au développement de ce zoning. Les Hauts-Sarts et nous, nous sommes bien situés. Trendy Food, par exemple, aurait aimé venir chez nous mais nous n’avions plus assez d’espace. Dans nos entreprises, nombreuses sont celles qui travaillent avec les Pays-Bas, le Luxembourg ou l’Allemagne, et pour cela nous sommes très bien mis. Je pense savoir que VPharma est enchanté d’être aux Plenesses, tout comme Charles Liégeois qui va d’ici un an torréfier son café sur Thimister."
Un nouveau mandat de 6 ans ?
Bourgmestre depuis bientôt six ans et impliqué politiquement depuis 41 ans, Lambert Demonceau brigue un second mandat à la tête de la commune.
"On a une bonne équipe, cinq membres sur six vont se représenter avec d’autres conseillers et de nouveaux candidats. On a une équipe rajeunie, le renouveau est en marche. Et je souhaite accompagner encore un peu cette démarche, par rapport aux projets à mener, pour une transition plus facile. Mais oui, je suis toujours passionné par la chose publique et comme on me demande de mener le groupe…"
Comment qualifieriez-vous le suivi effectué par la majorité des propositions déposées par l’opposition (groupe TC) ? Citez trois propositions émanant du groupe Transition Citoyenne que vous avez concrétisées ?
"Nous sommes toujours attentifs à leurs remarques et suggestions. Il faut juste pouvoir les inscrire dans la gestion globale d’une commune, avec les contraintes d’une commune (appels à projets, etc.). Mais quand on peut avancer sur une idée, on le fait. Nous avons, par exemple, deux budgets participatifs (de 2020 et de 2023), nous avons aussi eu des réunions dans les villages… C’est quelque chose qu’ils ont évoqué depuis très longtemps, par exemple. Nous essayons de mettre en route leurs idées mais il faut pouvoir les insérer dans un ensemble de projets en cours.
Autre exemple, tout ce qui est lié à la mobilité douce. Leur ancien conseiller, Herbert Meyer, avait beaucoup insisté dessus. Et là, on voit qu’on essaye de mettre en place tout un réseau de mobilité douce et cyclable sur notre commune. On a mis, avant, d’autres idées en place comme le broyeur… Mais il n’a pas beaucoup de succès.
Pour la troisième proposition, on peut citer la diffusion des conseils communaux depuis que nous sommes dans la nouvelle maison communale. C’était le dada de Monsieur Meyer, qui s’en chargeait lui-même, on l’a fait. C’est aussi un moyen de favoriser la participation des gens à nos débats."
Les questions citoyennes
Henri Lecloux, agriculteur retraité: "Il existe, depuis 2018, Terre d’Herbage au niveau de la province (qui nourrit de préférence en bio). Comment pourrait-on nourrir davantage les locaux (maison de repos, écoles, etc.) avec de la production locale ? J’aurais aussi souhaité que le Collège puisse garantir que chaque ferme locale soit reprise par d’autres agriculteurs et non par d’autres fermiers voyant plus grand (pour des exploitations à taille humaine)."
"C’est très difficile de garantir une reprise des exploitations par des agriculteurs d’ici – même si nous avons encore de la chance dans nos communes – car nous avons peu de leviers sur le foncier. Je pense que les actions que mènent les agriculteurs actuellement sont parfaitement fondées, ils se battent pour un meilleur prix et pour un accès à la terre. Mais c’est une compétence plus wallonne que communale au niveau du foncier qui, c’est vrai, est trop cher.
Concernant les produits locaux, on fait ce qu’on peut avec des achats dans les commerces locaux, via le magasin ici… Mais pour la maison de repos et les écoles il faut analyser les opportunités en fonction des réglementations (Afsca, etc.). On passe plutôt par des fournisseurs classiques mais on peut, en effet, y réfléchir et voir si cela matche en termes de respect des législations. On n’est pas opposé à ce que des producteurs locaux ou des coopératives soient présents (on participe d’ailleurs à ces dynamiques avec le RATaV,…)."
Patrick Magranne, du Réverbère (apolitique): "La Commune a le projet de refaire complètement la bibliothèque dans le bâtiment Vinifrance, cela a pris du retard mais pour un mieux. Quelle est l’idée ? Au niveau culturel, on travaille en triangle (échevinat de la culture, bibliothèque et Réverbère) avec des réunions entre les organismes, et la collaboration se passe très bien. Mais comment vit-on la Culture à Thimister-Clermont ? Quelle place prend-elle dans les décisions communales ?"
"La politique culturelle a pris un fameux essor avec non seulement les événements chaque mois à la chapelle de Bèfve mais aussi les gros spectacles (le prochain les 14 et 15 septembre). La culture est vivante, active. Pour la bibliothèque, on espère avoir les plans cette année, des travaux en 2025 et l’inauguration en 2026. On a dû changer notre fusil d’épaule par rapport à la maison communale mais nous avons déjà eu une réunion avec le CA de la bibliothèque, en leur demandant de venir vers nous en juin avec leurs souhaits (pour l’espace intérieur, les aménagements). Nous avons récemment vu celles d’Aubel et de Theux. Ici, nous aurons 400 m2 (soit 3 à 4 fois plus), ce sera un bel outil et une de nos priorités en dehors de toutes les activités menées par mon collège Gaston (NDLR: Schreurs)."
Roger Simul, ancien chef du Charmes-Chambertin: "Le développement économique, au niveau des petits commerces, est en déclin. À Clermont, nous avions six ou sept commerces avant et nous n’en avons désormais plus que deux. Quelles sont les initiatives faites ces dernières années et ce qui est prévu pour l’avenir pour éviter d’être une cité-dortoir ?"
"On a deux villages plus vivants: Thimister et La Minerie. Il est très difficile de réimplanter des commerces dans les trois autres villages (c’est d’initiative privée). Ici, on a mis à disposition des espaces publics extérieurs (Fourquet, prochainement friterie…). À La Minerie, c’est vivant aussi. On essaye de soutenir par la mise à disposition d’espaces, comme la terrasse du Renouveau qui se fera dans un mois, sur une place classée. Une terrasse permanente, de même qualité que celle du Fourquet. On doit aussi faire cohabiter les commerces avec les riverains (surtout au niveau du parking, en soirée à Thimister). Mais on a aussi eu, ces dernières années ou mois, une nouvelle fleuriste, Cycles Henrard et sa sœur Fika (des jeunes du village), deux pharmacies… Demain, le site Ruwet va aussi permettre le développement de commerces. Ce n’est pas en déclin, au contraire les commerçants se sont multipliés (on partait de peu) mais parfois sur de plus grands axes avec du parking."