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Qui est Xavier Mary, le plasticien qui fait polémique à Woluwe-Saint-Lambert ?

Sun Tower V, Xavier Mary

© Xavier Mary

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Par Xavier Ess

Devant le centre culturel Wolubilis, trône un étrange totem de 5 mètres de haut. Un empilement de pneus d'engin de chantier surmonté d'un carrousel de néons. Une installation de Xavier Mary qu'on aime ou qu'on déteste. Que veut-il nous dire ? Rencontre avec l'artiste. 

Sun Tower V, Xavier Mary
Sun Tower V, Xavier Mary © Xavier Mary

Xavier Mary est un jeune artiste belge (Liège, 1982) présent sur la scène internationale qui utile des matériaux industriels qu'il recycle, transforme pour créer des sculptures et des installations monumentales qui évoquent notre époque industrielle finissante. Des oeuvres brutales et fascinantes. Et derrière la lecture sensitive, il y a toujours une histoire plus complexe. La tour de pneus, Sun Tower V, évoque les tours en briques des temples kmers. Des objets mégalomaniaques, comme l'explique Xavier Mary, "souvent construits par des rois et qui étaient là pour asseoir la puissance d’une civilisation qui finalement courait à sa perte. L’empire Kmer s’est effondré à cause d’un manque d’eau."

Une polémique pleine de sens 

Plusieurs articles de presse ont évoqué le désarroi des passants face à cet objet installé dans un des points névralgiques de Woluwe-Saint-Lambert. Un remous dont se réjouit l'artiste : "Dans la polémique on voyait des gens qui disaient "c’est une décharge d’immondices "… et ça pose cette question-là. Tout mon travail tourne autour d’une époque industrielle autour de laquelle il y a maintenant une polémique générale très forte. C’est le dernier volet d’une évolution humaine qui s’est faite sans véritable réflexion sur les finalités possibles, on se rend compte maintenant que l’époque industrielle nous mène à notre perte. Ces pneus de taille géante nous ramènent très fortement à ça. Ce sont des objets en caoutchouc, très difficiles à recycler et liés à l’univers automobile qui est central dans mon travail. En tant qu’emblème d’une époque industrielle pour le meilleur et pour le pire."  

Highway Rottor, Xavier Mary - courtesy collection Uhoda
Highway Rottor, Xavier Mary - courtesy collection Uhoda © Xavier Mary

Les traces d’un monde à abolir

Pour sa première exposition solo au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles en 2006, Xavier Mary créé la pièce Highway Rottor constituée de lampes d'autoroutes. Ces matériaux deviennent les objets principaux de son langage (l'automobile comme objet ultime du XXe siècle) et renvoient déjà à la question de l’écologie. Ces trois dernières années, c'est la question de l’anthropocène, d’une époque complètement façonnée par l’homme et qui menace sa survie, qui est devenue centrale. Au fur et à mesure du temps, le travail de Xavier Mary rejoint le débat commun et gagne en puissance. Il questionne l'époque, l'idée du progrès et le futur que nous construirons. Ces oeuvres pourraient être des fétiches du passé, mais on n'en est pas encore là. Comme l'écrit Pieter Vermeulen auteur du livre Literature and the Anthropocenele spectre du passé ne cesse de hanter notre moment présent. Et on ne peut pas s’en débarrasser. La fête est finie, l’after était un peu nulle, et maintenant quoi ? "

Ghost Rider, Xavier Mary
Ghost Rider, Xavier Mary © Xavier Mary
Too many Parties, Xavier Mary - courtesy collection Uhoda
Too many Parties, Xavier Mary - courtesy collection Uhoda © Xavier Mary

Révéler la nature des materiaux

Xavier Mary utilise des matériaux bruts, recyclés ou refaçonnés. Il travaille ses pièces uniques en collaboration avec des entreprises. Il est donc en permanence en dialogue avec la société industrielle. Les pièces sont souvent sablées pour révéler la matière brute, la texture du métal dans sa phase pré-industrielle ou alors le métal est poli pour s'approcher du miroir. "Mettre à jour la fabrique du réel", explique le plasticien. 

Ce sont des ventilateurs de tunnel routier pour Ghost Rider, des ports de sécurité routière d'autoroute, des panneaux anti-bruit pour Krauss, des logos pour Petrolatum ou un agencement de 150 feux arrière de camion, clignotants en rythme pour la pièce Too many Parties​​​​​​​. La pièce a été montrée dans l'exposition Dance floor of emergency, en résonnance avec la crise des subprimes de 2008. Pour Xavier Mary, "dans le capitalisme, on a tellement voulu s'amuser  avec les valeurs de la bourse qu'il y a comme une fête triste qui va générer un revers au niveau de l'économie mondiale."

Krauss, Xavier Mary - courtesy Galerie Baronian Xipass
Krauss, Xavier Mary - courtesy Galerie Baronian Xipass © Xavier Mary
Petrolatum, Xavier Mary
Petrolatum, Xavier Mary ©  Xavier Mary

Sun Tower V en prélude à la Biennale P(art)cours-Par(kunst) 

L'installation de Xavier Mary face au centre culturel Wolubilis sera visible jusque fin mars. Elle sera rejointe par une installation du collectif Void, installée sur le toit du centre culturel. Ces deux événements annoncent la quatrieme édition de la Biennale P(art)cours - Par(kunst). Une biennale d’art contemporain en plein air qui se déroulera du 25 avril au 27 juin dans les communes de Woluwe-Saint-Pierre, Auderghem et Woluwe-Saint-Lambert. 

Ego will tear us apart (part ii), Xavier Mary
Ego will tear us apart (part ii), Xavier Mary © Xavier Mary

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