Le sanatorium Joseph Lemaire à Tombeek, abandonné ... - Dimension
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<strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire à <strong>Tombeek</strong>, abandonné<br />
et décrépi est une perle de l’architecture moderniste.<br />
Ce bâtiment qui a été conçu par Maxime Brunfaut, rêve<br />
d’un avenir meilleur. <strong>Dimension</strong> rencontre les animateurs<br />
de RedHetSanatorium.<br />
Des jeunes gens passionnés. Cela existe encore. Brecht Van<br />
Duppen, les frères Sander et Greg Gosiau, encore gamins, fouinaient<br />
déjà dans les bâtiments abandonnés et vides. <strong>Le</strong> romantisme<br />
de la déchéance les attirait et c’est pour cela qu’avec leurs<br />
économies, ils ont parcouru tout le pays à la recherche de trésors<br />
architecturaux. C’est ainsi qu’à Louvain, dans le Vaartkom (le Bassin<br />
de Navigation), ils ont découvert ce qui peut être considéré<br />
comme La Mecque du bâtiment inoccupé: l’ancienne usine de<br />
Marie-Thumas et le Stordeur (ndlr ancienne usine de traitement<br />
du maïs) tous deux démolis depuis. <strong>Le</strong> trio connaissait ses bâtiments<br />
sur le bout des doigts. A <strong>Le</strong>de, ils ont encore découvert<br />
le domaine abandonné de Meesen avec le marquisat décrépi<br />
de l’architecte italien Nicolas Servadoni. Sans parler du bâtiment<br />
scolaire néogothique à moitié effondré. Tous ces bâtiments, recelaient<br />
pour eux non seulement une bonne part de mystère,<br />
mais fournissaient de plus la preuve irréfutable que l’architecture<br />
n’est ni intemporelle ni séculaire.<br />
A Gand ils ont visité l’ancienne Blekerij (Blanchisserie). Et l’on<br />
peut continuer longtemps ainsi. La liste de leurs visites est longue<br />
et impressionnante. Et puis soudain, ils sont tombés sur le<br />
<strong>sanatorium</strong> de <strong>Tombeek</strong>. Disons en 2005. Brecht van Duppen:<br />
« D’abord nous avons vu la morgue, un bâtiment au volume admirable,<br />
dans un style moderniste, avec derrière lui l’immense<br />
<strong>sanatorium</strong>. Nous sommes allés voir et avons découvert qu’à l’intérieur,<br />
le parcours était relativement compliqué et que tout était<br />
imbriqué l’un dans l’autre. Actuellement, le bâtiment se trouve<br />
dans un état déplorable. Il est urgent aujourd’hui, d’intervenir. »<br />
RedHetSanatorium de<br />
<strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire bientôt sauvé<br />
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projet<br />
<strong>Tombeek</strong><br />
1937<br />
Autour et dans le <strong>sanatorium</strong> se développe une sous-culture<br />
exubérante et étrange. Nous avons même rencontré un jour<br />
quelqu’un avec un fusil airsoft. Ce qui était quelque peu étrange<br />
et surréaliste. « Cela n’a pas perturbé le trio. <strong>Le</strong>s trois amis sont<br />
tombés sous le charme de l’architecture et de son environnement<br />
vert et boisé. Ils sont partis à la recherche du temps, de<br />
son histoire et surtout d’un possible futur. La création du groupe<br />
d’action Red Het <strong>sanatorium</strong>, fin 2006 est devenue un fait. <strong>Le</strong><br />
bâtiment conçu par Maxime Brunfaut, fils du grand et célèbre<br />
Fernand Brunfaut, date de 1937. <strong>Le</strong> père, Fernand, a également<br />
participé au projet, mais il a laissé les honneurs à son fils. Son<br />
nom brille encore toujours sur une paroi carrelée sur laquelle on<br />
peut lire en typographie très claire: (‘Maxime Brunfaut architecte<br />
sept. 1937’). <strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> a conservé sa fonction médicale pendant<br />
50 ans, c’est-à-dire jusqu’en 1987. ‘Notre date de naissance’<br />
ajoute Brecht Van Duppen. Aujourd’hui Brecht et Sander sont en<br />
troisième année d’architecture à Bruxelles et Greg commence sa<br />
troisième année d’histoire de l’art à la VUB. Ils se sont assagis et<br />
ils ont accumulé pas mal d’expérience depuis leurs années de<br />
secondaire. L’insouciance s’est évanouie, effacée par les tiraillements<br />
politiques, les intérêts des groupes d’influence divergents<br />
et la fréquentation des médias. Un des moments cruciaux a certainement<br />
été le Monumentenstrijd (concours des monuments).<br />
A l’époque, ils effectuaient leur dernière année sur les bancs<br />
de l’école. « <strong>Le</strong>s contacts avec la rédaction de l’émission Monumentenstrijd<br />
se sont déroulés pendant les derniers jours de<br />
notre dernière année de l’enseignement secondaire, mais toute<br />
l’agitation qui a entouré le tournage et la diffusion de l’émission<br />
proprement dite, ont eu lieu pendant notre première année de<br />
l’enseignement supérieur ».<br />
‘Monumentenstrijd’<br />
Sander Van Duppen: « Greg a reçu une lettre pour participer au<br />
Monumentenstrijd. Il a composé le dossier, il est très fort dans<br />
ce domaine. Mais finalement la participation n’a pu avoir lieu, car<br />
l’autorisation du propriétaire était nécessaire. Dans notre cas, il<br />
s’agissait d’Olivier Herpain, un promoteur immobilier bruxellois<br />
qui fait aussi partie des 200 Belges les plus riches. Il ne voulait en<br />
aucun cas que son nom soit lié au <strong>sanatorium</strong> à l’abandon. Donc,<br />
ce fut ‘njet’(rien)! Entre-temps Canvas voulait nous avoir sur la<br />
pellicule, posant devant le bâtiment. Ce que la chaîne cherchait<br />
surtout c’était un récit très médiatique avec nous comme sujet<br />
principal. Heureusement tout s’est bien passé. Mais ce que nous<br />
voulions, c’était la prime de Monumentenstrijd et malheureusement<br />
cela n’a pas réussi. » Brecht: « C’est à l’époque du Monumentenstrijd<br />
que nous avons aussi lancé notre site web. C’est<br />
surtout Brecht qui s’est lancé dans l’esthétique graphique. Il a<br />
développé une typographie qui s’adapte stylistiquement très<br />
bien à l’atmosphère du <strong>sanatorium</strong> de Brunfaut.<br />
»<br />
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choses et n’est pas encline à traiter rapidement les dossiers se<br />
rapportant au <strong>sanatorium</strong>. C’est du moins l’impression qu’elle<br />
donne. La commune veut préserver son caractère rural et intact.<br />
Il y a la peur de voir des entreprises wallonnes venir s’installer<br />
ici. Il y a la crainte de voir, lorsque le <strong>sanatorium</strong> aura la fonction<br />
d’habitat, les francophones venir s’installer ici. <strong>Le</strong> dossier du <strong>sanatorium</strong><br />
a été, jusqu’à maintenant, à chaque fois retardé. »<br />
Même après le Monumentenstrijd, les trois mousquetaires, comme<br />
les appelle la presse, ne laissent pas tomber les bras même<br />
si, pour le moment, Sander et Brecht y passent un peu plus de<br />
temps que Greg Giosiau. Ils rêvent encore toujours d’une réhabilitation<br />
de ce superbe morceau d’architecture dont il existe<br />
deux exemples modernistes semblables en Europe, c’est-à-dire<br />
à Hilversum et en Finlande où Jan Duyker et Alvar Aalto ont créé<br />
deux perles architecturales semblables. Notamment le <strong>sanatorium</strong><br />
Paimio (1929-1933) du dernier cité est devenu mondialement<br />
célèbre tout comme le Zonnestraal (Rayon de Soleil) de<br />
Jan Duiker (1926-1928) qui peuvent y être ajoutés dans leur état<br />
de restauration actuel.<br />
Soutien moral<br />
<strong>Le</strong> Zonnestraal à Hilversum, était en train de dépérir depuis quelques<br />
années, tout comme le <strong>sanatorium</strong> de <strong>Tombeek</strong>. Mais les<br />
bâtiments délabrés sont en cours de rénovation depuis 1998,<br />
suivant le projet de Wessel de Jonge et Hubert-Jan Henket. <strong>Le</strong><br />
premier s’est rangé moralement derrière les ambitions du jeune<br />
trio. Sans nul doute un excellent coup de pouce. « Nous avons<br />
essayé de sensibiliser l’opinion publique (affiche et campagne<br />
de dépliants, site-web etc.) en organisant des visites guidées.<br />
Cela a assez bien réussi. Il nous arrivait de recevoir jusqu’à 200<br />
personnes intéressées. Cela nous a donné beaucoup d’énergie.<br />
Nous sommes jeunes, pas concernés par la politique et n’avons<br />
aucun pouvoir. Et pourtant, la politique joue ici un rôle non négligeable<br />
». Selon Sander Van Duppen, les politiciens locaux<br />
de <strong>Tombeek</strong> sont très bien disposés envers les Flamands. « Ils<br />
sentent la pression de Bruxelles et ont une peur bleue de la francisation.<br />
Mais nous sommes plus préoccupés par cette architecture<br />
unique et voulons que la qualité architecturale du bâtiment<br />
retienne l’attention. La commune laisse encore trop trainer les<br />
Décision finale<br />
En 2000, il a été question d’en faire un centre d’asile, mais cela<br />
ne semblait pas possible, bien que le gouvernement et la régie<br />
des bâtiments se soient attelés au projet. Cette histoire de<br />
centre d’asile s’est effondrée comme un château de cartes, à<br />
cause du prix et pour d’autres raisons obscures. A un moment<br />
donné, Olivier Herpain a voulu y installer des entreprises. Général<br />
Electric avait des plans pour en faire un quartier général<br />
mais les Monuments et Paysages s’y sont opposés car on dévierait<br />
trop des plans originaux; Bos en Groen ont donné un<br />
avis négatif parce qu’il faudrait abattre trop d’arbres pour faire<br />
une aire d’atterrissage pour hélicoptères. Pendant ce temps, le<br />
délabrement se poursuit. <strong>Le</strong> département Bos en Groen a aussi<br />
donné un avis négatif pour les plans que le promoteur immobilier<br />
Victoria Lofts présentait pour le <strong>sanatorium</strong> de <strong>Tombeek</strong>.<br />
Ce dernier veut aménager une cinquantaine d’appartements à<br />
la finition luxueuse dans le bâtiment délabré. Ces plans ont été<br />
entre-temps modifiés et pour le moment on pense à une maison<br />
de repos. Actuellement, trois promoteurs immobiliers planchent<br />
sur <strong>Tombeek</strong>, parmi lesquels Victoria Lofts et le bureau Storme<br />
Van Ranst. Brecht Van Duppen: « Dans le courant de septembre,<br />
une décision sera prise qui décidera du sort du <strong>sanatorium</strong>, du<br />
moins c’est ce que l’on nous a dit. Nous attendons toujours avec<br />
autant de patience, mais s’il le faut nous passerons à l’action. »<br />
A suivre, sans aucun doute.<br />
Maxime Brunfaut et le <strong>sanatorium</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire<br />
Maxime Brunfaut a reçu en 1933 de La Prévoyance Sociale, la<br />
mission de concevoir un <strong>sanatorium</strong> pour 150 patients masculins<br />
souffrant de tuberculose. Pour cela, un terrain avait été acheté<br />
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sur la <strong>Tombeek</strong>heide (la bruyère de <strong>Tombeek</strong>) près d’Overijse.<br />
13 mois après la pose de la première pierre - un temps record -,<br />
le <strong>sanatorium</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire a été inauguré le 30 septembre<br />
1937, salué par un intérêt international. <strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> reçut le<br />
nom de <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire, en hommage à l’ancien directeur de<br />
La Prévoyance Sociale. Maxime Brunfaut (1909-2003) a grandi<br />
dans une famille d’architectes, activistes socialistes. Son père,<br />
Fernand et son oncle Gaston étaient également architectes.<br />
<strong>Le</strong> complexe a été édifié dans une zone naturelle superbe, à une<br />
vingtaine de kilomètres au sud de Bruxelles. Il comprend un bâtiment<br />
principal - le <strong>sanatorium</strong> - et divers bâtiments annexes,<br />
dispersés sur le terrain. Quand on pénètre dans le domaine par<br />
la conciergerie, une large allée s’étend devant soi. Cette allée,<br />
avec à mi-chemin la maison du docteur, conduit au <strong>sanatorium</strong>.<br />
Au côté nord du bâtiment, plus sombre, un chemin creux mène<br />
le long de la morgue vers le bas de la côte. A cet endroit l’on<br />
trouve encore quelques bâtiments: les installations de chauffage,<br />
la station de pompage, la buanderie et la résidence du<br />
personnel.<br />
RedHetSanatorium<br />
En 2007, après 20 ans d’abandon, il ne restait plus que l’ombre<br />
de la gloire avec laquelle le bâtiment avait été inauguré 70 ans<br />
auparavant. Suite à cet « anniversaire », l’action RedHetSanatorium<br />
a été lancée et jusqu’à maintenant celle-ci continue à travailler<br />
aussi bien pour la conservation que pour la restauration<br />
du bâtiment.<br />
Dépliant touristique<br />
Depuis peu, le RHS a commencé la diffusion d’un ‘dépliant touristique’.<br />
Ceci fait partie d’une nouvelle action ludique: « <strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong><br />
<strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire, une attraction touristique internationale<br />
». Par cette action, RHS espère atteindre un public encore<br />
plus large. <strong>Le</strong> « dépliant touristique » attache non seulement de<br />
l’importance au <strong>sanatorium</strong> en tant qu’attraction, mais aussi à<br />
l’action ‘RedHetSanatorium’. Celui qui souhaite aider à sa diffusion<br />
peut prendre contact via info@redhet<strong>sanatorium</strong>.be<br />
DOCOMOMO<br />
RedHetSanatorium a eu la possibilité, via une représentation par<br />
poster et la diffusion de dépliants, de présenter la situation du<br />
<strong>sanatorium</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Le</strong>maire et la problématique de sa situation<br />
à la 10 ème conférence internationale DOCOMOMO à Rotterdam.<br />
Des experts du monde entier, s’occupant de la documentation<br />
et de la conservation de l’héritage moderniste, y étaient présents.<br />
DOCOMONO sont les initiales de « DOcumentation and<br />
COnservation of buildings, sites and neighbourgoods of the<br />
MOdern MOvement. “<br />
www.redhet<strong>sanatorium</strong>.be<br />
projet<br />
<strong>Le</strong> Zonnestraal à Hilversum<br />
<strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> <strong>Le</strong>maire, n’est pas un cas isolé. Parce que les bâtiments<br />
modernes ont souvent été construits avec des méthodes<br />
de constructions nouvelles, comme les structures avec squelettes<br />
en béton, les grandes baies vitrées, le plâtrage ou - dans le cas<br />
du <strong>sanatorium</strong>, le carrelage, ils sont généralement très fragiles et<br />
leur restauration avec conservation de leur ancien rayonnement<br />
est souvent impayable.<br />
<strong>Le</strong> <strong>sanatorium</strong> Zonnestraal à Hilversum, qui a été construit dans<br />
la même période, a aussi dû faire face à ces problèmes. Après<br />
des années d’abandon et de déchéance, une restauration fondamentale<br />
du premier bâtiment a commencé en 1998. Maintenant,<br />
9 années plus tard, on est occupé au dernier bâtiment.<br />
<strong>Le</strong> manager de développement Jos Buskermolen d’Alliantie:<br />
« <strong>Le</strong>s fonctions qui sont maintenant abritées au Zonnestraal, sont<br />
quasiment toutes reliées aux soins. <strong>Le</strong> but est que les fonctions<br />
qui ne sont pas en relation avec les soins disparaissent pour faire<br />
place à des fonctions qui le sont. <strong>Le</strong> nouveau bâtiment de soins<br />
que nous allons développer et construire est destiné à quelques<br />
© Jan Lankveld<br />
petites cliniques traitant d’ophtalmologie et d’autres disciplines<br />
appartenant aux soins de santé. De plus, nous sommes occupés<br />
à la restauration des bâtiments principaux, de sorte que nous<br />
serons à nouveau en ordre pour quelques années. Et le domaine<br />
en lui-même est aussi rafraîchi. Il est actuellement trop envahi<br />
par les broussailles et autre verdure, qui empêchent de percevoir<br />
son ancienne limpidité. »<br />
www.de-alliantie.nl<br />
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